Depuis le printemps 2020, le marché immobilier canadien est en surchauffe. Ce phénomène est particulièrement prononcé au Québec, qui a connu une demande exponentielle pour les maisons et condos. Cela a contribué à l’augmentation des loyers des locataires et des coûts plus élevés pour l’achat d’une première résidence.
Andrés Fontecilla, député provincial de Laurier-Dorion et le porte-parole de Québec Solidaire sur l’habitation, pointe le doigt vers les courtiers immobiliers.
« Il peut exercer certains types de pratiques qui font en sorte que les prix ont tendance à monter, comme ne pas divulguer les différentes offres d’achats ou suggérer à des acheteurs de vider un appartement pour augmenter les loyers. Ces différents types de pratique contribuent à l’augmentation des prix», affirme-t-il en entrevue.
Il peut être tentant de chercher un bouc émissaire. Lorsqu’il s’agit d’un sujet complexe comme le parc immobilier québécois, la réalité est bien plus complexe.
L’offre et la demande
Les propriétés résidentielles ne sont pas à l’abri des lois de l’offre et de la demande. La pandémie a créé une forte demande pour les maisons. Cela a créé un marché très favorable aux vendeurs, et ajouté un fardeau supplémentaire à ceux et celles à la recherche d’une première habitation.
« Ils ne font que faire leur job. Dans la tête du vendeur, du consommateur, il ne veut pas manquer son coup. Il va prendre le courtier qui frappe le plus fort dans son quartier, qui est le plus imposant (…) Ça crée un univers de surchauffe, un univers où il y a des vedettes. C’est comme des joueurs de hockey. C’est rendu des vedettes qui ont pignon sur rue, qui sont connues dans ton quartier », dit Pierre-Yves McSween à sa chronique sur 98.5 FM.
« Si on est dans un monde ou il manque de maisons offertes, les maisons sur le marché se vendent plus facilement et plus rapidement. Et eux (les courtiers), ils ne sont que la courroie de transmission. », explique-t-il.
Si l’offre est à la base du problème, combien de maisons doit-on construire pour pallier le manque? Pour les unités locatives, le taux d’innocupation est autour de 2,4% au Québec, sous la barre des 3% nécessaire pour soutenir l’immigration récente et les clientèles à risque. Vu qu’il y a 890 538 habitations au Québec en total, il manquerait 5 300 nouvelles unités locatives, distribuées dans plusieurs villes au Québec.
Pour le marché de la revente, le manque est encore plus criant. Dans son dernier rapport sur la surchauffe immobilière, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) émet un constat alarmant sur cette réalité:
« Au total, nous évaluons qu’il manquait entre 40 000 et 60 000 habitations au Québec à la fin de 2020. Ce déficit aurait pu être comblé en augmentant l’offre, c’est-à-dire principalement en accélérant le rythme des mises en chantier7. Peut-on conclure pour autant que si l’on avait construit entre 40 000 et 60 000 nouveaux logements de plus l’année dernière, ils auraient pratiquement tous trouvé preneur? Presque. »
Limiter l’étalement urbain
L’accès aux habitations a atteint un creux historique. Face à ce problème, nous devons prendre en considération où construire, et quel type d’habitations.
Pour préserver le caractère unique de certains quartiers, plusieurs villes comme Montréal adoptent des strictes règlements d’urbanisme qui limitent la hauteur des futurs projets résidentiels. Vu que les condos et les maisons se font plus rares dans ces secteurs, les résidents peuvent quitter la ville pour s’installer en banlieue. Le manque d’infrastructure de transport en commun les encouragent à se transporter en voiture. L’étalement urbain, bête noire des urbanistes, contribue au smog en ville, à la destruction des écosystèmes dans la GRM, et augmente les coûts de superstructures de transport en commun.
Délais excessifs
Le besoin de renouveller le parc immobilier est criant. Toutefois, le cadre réglementaire actuel augmente les délais d’approbation des projets.
« Les délais sont parfois très longs avant d’avoir toutes les autorisations pour qu’un projet immobilier puisse voir le jour. Puis, on ne parle pas de mois, on parle d’années dans plusieurs municipalités.», dit Paul Cardinal directeur du Service économique de l’APCHQ, en entrevue avec Les Affaires.
Ces conditions nuisibles à un marché immobilier stable pointent vers une solution axée sur l’offre. Il serait plutôt simpliste de réprimander un seul acteur, tout en évitant de trouver des solutions pour le manque de logements.